Les blogs de bibliothèques : premières étapes vers la gestion de contenus dans les bibliothèques?

Intéressant article de Jean Charles Houpier qui présente Scriblio (ex-wopac), un Opac crée à partir de wordpress, célèbre outil open source de blog et CMS.

Extrait :

Il s’agit d’une interface basée sur WordPress (…) et qui semble très prometteuse si l’on s’en réfère aux bibliothèques qui l’ont installé et intégré.

Cook Memorial Library, in Tamworth New Hampshire (our public library development partner)
Beyond Brown Paper, an archive of photos from the Brown Manufacturing Company in northern New Hampshire
Lamson Library, of Plymouth State University

En termes d’installation, c’est vraiment très simple et ça prend une petite demi-heure tout compris. L’importation des données peut s’effectuer soit à partir d’un fichier Marc 21, soit à partir d’une interface web de catalogue.

Au final, on se retrouve avec un Opac où chaque post est une notice que l’on peut commenter, tagger. Les notices sont regroupées par date d’édition, par catégories. On dispose d’une recherche sur tous les mots de la notice. On affiche les couvertures des ouvrages quand elles existent.

Quelques pistes de réflexions à partir de cette chouette initiative qu’est Scriblio:

Il y a quelque temps, j’ai fait un zoom sur 5 blogs de bibliothèques. Or sur les 5 blogs observés, tous proposent des « critiques » de livres ou d’autres supports, autrement dit ils mettent en place une forme d’éditorialisation des contenus. A chaque fois, ce qui pose problème, c’est l’intégration au catalogue : les internautes ne disposent pas sur la page du blog d’un lien profond vers la notice leur permettant de s’informer sur la disponibilité en temps réel du document, ce qui est pourtant une fonction de base que propose n’importe quel SIGB!

Tout se passe comme si les bibliothécaires, en se saisissant de l’outil blog voulaient lui faire faire ce qu’ils ne peuvent faire sur les sites institutionnels des bibliothèques : enrichir les notices!

Le paradoxe est le suivant : d’un côté nous disposons de prestataires proposant en majorité des logiciels propriétaires qui ajoutent de plus en plus une couche « éditoriale » à des produits qu’ils nous vendent ensuite comme des « versions 2.0 » (waaaaa des fils RSS dans mon catalogue en 2008!) et essaient de faire briller les yeux des bibliothécaires ayant récemment suivi une journée d’étude sur le sujet… D’un autre côté les CMS Open source arrivent à une maturité très intéressante (et en particulier l’outil de blog/CMS wordpress, qui permet de gérer un site complet, bien au delà d’un blog), précisément sur le créneau qui fait défaut à nos prestataires : la rédaction collaborative et la gestion de contenu.

Autrement dit, pas mal de prestataires cherchent à réinventer la roue en proposant mal ce que font très bien les outils open source! Par exemple un prestataire que je ne nommerai pas propose l’édition de dossiers documentaires sans fil RSS, sans feuille de style et plus grave, sans aucune gestion de la chaîne de publication… Alors que les outils open source proposent tous depuis fort longtemps un workflow évolué, des thèmes, respectent les standards et sont MODULABLES sur le modèle de l’expérimentation : je découvre un plugin, je le propose, j’améliore l’outil moi-même en fonction de mes besoins. C’est particulièrement vrai pour la plateforme de blog/CMS WordPress : la communauté mondiale est tellement large et réactive (A comparer aux quelques centaines, au mieux, de clients d’un club utilisateur d’un produit) et le nombre de plugins est tel l’on trouve dans 90% des cas un plugin tout prêt permettant d’ajouter la fonctionnalité souhaitée. (ce qui n’empêche de se faire aider par un prestataire privé indépendant du logiciel qui peut créer un plugin, évidemment.)

Scriblio est une magnifique démonstration de cette tendance. Il repose sur le principe d’une notice = un billet. Le mouvement est ici inverse de ce qu’énormément de bibliothèques en France proposent aujourd’hui : un gros portail propriétaire et un petit blog satellite plus ou moins libre, qui éditorialise une partie du catalogue…sans en proposer les fonctions de base. Pour d’ailleurs finir par y être intégré, comme le montre la bibliothèque de Villepinte en commentaire de ce billet.

Scriblio fait l’inverse: il part de l’ergonomie du blog et de ses qualités d’outil de gestion de contenu pour en faire un catalogue de bibliothèque… D’où la question suivante : Et si au lieu de demander d’abord à nos outils informatiques de gérer des bases de données (ce qu’il doivent faire dans tous les cas) nous devions leur demander EN PREMIER LIEU d’être de très bons outils de gestion de contenu?

Je lisais d’ailleurs qu’une nette tendance de la Génération Y (dont je fais partie) est de réutiliser au travail les outils qu’ils utilisent à la maison… Au delà de l’anecdote, réfléchissez à cela : une bonne partie de la Biblioblogosphère utilise WordPress ou assimilé. Imaginez que les compétences acquises dans le maniement de l’outil utilisé pour bloguer soient pleinement réutilisables dans le domaine professionnel… Là on est plus dans l’anecdote, mais dans le knowledge management… 🙂 (waaaa comme j’adorerai gérer un SIGB sous wordpress!)

Depuis la date de publication du billet de JcHoupier, Scriblio annonce 2 autres bibliothèques qui l’utilisent :

Si vous voulez en savoir plus, JCHoupier, encore, donne d’autres exemples et rappelle un autre intérêt de ce type de solution : Chaque référence bibliographique du catalogue est un post que les moteurs de recherche vont pouvoir indexer.

En ce moment, on observe une tendance forte au développement d’OPACs basés sur des CMS :

Même s’il faut rappeler que bien souvent c’est moins l’outil qui fait défaut qu’une véritable organisation interne permettant de les rédiger et des les diffuser, ces contenus, je pense qu’un blog de bibliothèque est une manière précieuse d’initier les équipes à une éditorialisation qui fait souvent défaut. Le blog représente aussi une manière de développer un rapport spécifique aux usagers, un rapport de proximité que l’on trouve moins sur les sites institutionnels. Je ne dis donc pas qu’il faut supprimer les blogs mais que la partie « critiques » qu’ils comportent est très caractéristique de la situation actuelle… Les blog sont aussi une manière précieuse d’initier bon nombre de collègues à une plateforme d’une très grande simplicité d’utilisation comme WordPress. (faites des blogs sous wordpress, vous ne le regretterez pas!)

Pour finir sur une note plus pragmatique (tout le monde ne passera pas sous scriblio demain, malheureusement), je me demande si, aux côtés des solutions full open source comme Koha ou PMB, le duo gagnant le plus apte à être adopté par les professionnels n’est pas un SIGB propriétaire avec maintenance + un CMS open source avec prestataire… Oui, les blogs sont des premières pierres.

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