Mindpost : la bibliothèque comme plateforme de collaboration

Hubert Guillaud a relayé récemment un projet danois très intéressant :

Comment la bibliothèque s’adapte-t-elle aux jeunes ? C’est la question que se pose MindPost, un projet Danois (voir le .pdf en anglais) qui vise à faire de la bibliothèque un porte-parole de la culture des jeunes. Un bel exemple qui montre comment les services doivent s’insérer dans la culture jeune pour s’y renouveler.

De fait, je vous conseille de regarder cette vidéo de présentation qui dure 5 minutes :

Que retenir de ce projet ? (lisez le pdf, il est en anglais, mais ça vaut le détour !).

La bibliothèque est ici envisagée comme une « plateforme de collaboration », un troisième lieu, en l’occurrence dédiée aux jeunes. L’idée n’est donc pas de partir de besoins présupposés pour élaborer une offre de service mais bien de co-construire avec des gens en fonction de leurs besoins, et à partir de ces besoins mettre en œuvre des dispositifs.

Autrement dit, là où en France on a plutôt tendance à dire : on va travailler sur un thème et après on va solliciter des jeunes et monter un projet d’action culturelle, ici c’est l’inverse. On réunit d’abord une communauté de jeunes et seulement ensuite on développe un projet qui sert de matrice à des dispositifs qui répondent à un ensemble de besoins. Ce projet associe deux « espèces » : les Minkeepers, et les Mindspotters (= bibliothécaires)


Les actions menées sont ensuite déclinées comme suit (voir le film pour plus d’infos) :

On est là ni dans un projet technique d’initiation à un outil, ni dans une enquête sociologique, ni dans une animation culturelle, mais bien dans un projet d’animation de communauté à vocation pédagogique à partir des moyens d’une bibliothèque. Le numérique n’est qu’un des supports/outils parmi d’autres (dont une caravane !) pour discuter de sujets proposés par les jeunes, mais toujours encadrés par des adultes. Ce projet est exemplaire parce qu’il est remarquablement bien conçu, multidimensionnel et vraiment tourné vers la population à laquelle il s’adresse. Voilà qui est enthousiasmant non ?

On le voit, la démarche n’est pas d’abord centrée sur les contenus comme « mise en valeur des collections ». La bibliothèque est donc utilisée en tant que lieu, et compétences d’accompagnement (les mindkeepers), pas en tant que ressources documentaires.

Une bibliothèque est d’abord un outil, distinct de l’école, malgré des missions très proches, par ses collections.  Ce type de projet est intéressant parce que le lien est encore plus fort. L’école est d’abord un lieu de savoirs en action avant d’être un lieu de ressources documentaires. La bibliothèque, elle se définit d’abord par rapport à ses ressources : un réservoir de données mobilisables et « médiatisables« . Or on le voit, la tendance d’une bibliothèque comme troisième lieu la pousse vers une fonction de lieu-ressource qui interroge le lien aux collections.

Pour autant, il me semble que si la forme est innovante, et la gestion de projet redoutablement efficace, on est bel et bien dans des objectifs qui ne sont pas clairement exprimés mais sont bien réels : on cherche à mobiliser des savoirs, a développer une culture informationnelle une approche des médias (le groupe crée un livre), tout ça encadré par une équipe de bibliothécaires qui tissent des partenariats avec des professeurs. Il s’agit en réalité d’une manière de renouveler le positionnement de l’action pédagogique de la bibliothèque en lien avec l’école.

Au final, est-on aussi coupés des préoccupations des jeunes pour ne pas pouvoir concevoir des projets qui répondent à leurs attentes ? J’ai croisé dans ma courte vie professionnelle des projets moins ambitieux mais tout aussi bien élaborés, sans pour autant se targuer d’une co-création de contenus… L’école, en définissant à l’avance des savoirs à acquérir se situe a priori en opposition à cette approche, mais ça n’empêche pas certains professeurs de développer des dispositifs innovants pour des objectifs pédagogiques non ? Les objectifs d’un projet sont-ils plus intéressants parce que les livrables du projet (pardon pour le jargon mais les mots sont importants) sont issus des utilisateurs (en « co-création ») ?  N’est-on pas en réalité dans un renouvellement de la gestion de projet, sans remise en cause d’objectifs pédagogiques portés par le couple bibliothèque/école ?


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