Qu’est ce qu’un Manga Café ? C’est un lieu de détente dans lequel une gigantesque bibliothèque de mangas est mise à votre disposition. Le premier Manga Café ou «manga kissa» est né au Japon en 1979 dans un quartier étudiant de Tokyo. Les mangas Cafés ont connu un essor extraordinaire puisqu’aujourd’hui on en dénombre près de 3500 dans tout le Japon. Le concept en lui même a évolué. Si au départ, il s’agissait de simples «coffee shop-bibliothèques», la diversité des services proposés s’est incroyablement développée: accès wifi, bornes de jeux vidéos, fauteuils de massage, possibilité de dormir sur place, vente de produits dérivés… etc.
Ainsi, moyennant 3 ou 4 euros de l’heure, vous avez accès libre à la bibliothèque – faites le calcul: un manga coûte aujourd’hui près de 7 euros, les lecteurs avertis en liront trois par heure, six pour les lecteurs supersoniques; l’économie réalisée est réelle ! Mais vous avez également à votre disposition des bornes de jeux vidéos, des ordinateurs et Internet en libre service, des boissons à volonté; le tout dans un espace confortable au design très agréable, marqué par le noir, le blanc et le rouge.
Voici les tarifs et horaires :
Première heure creuse indivisible: 3 €, Première heure pleine indivisible: 4 €, Toutes demi-heures suppl.: 1,50 €
Pass 1 journée : 20 €, Carte 10 heures: 30 €, Carte 20 heures: 55 € (soit 2,75€/heure), Carte 50 heures: 125 € (soit 2,50€/heure), Carte 100 heures: 250 € (soit 2,50€/heure)
Heures creuses : Mardi à vendredi 10h30-13h Heures pleines : Lundi à vendredi 13h-20h
Dans ce lieu on ne prête pas des documents, on les vend et on loue du temps pour les lire dans un espace agréable. Je trouve très intéressante cette manière de déplacer le service de prêt de l’objet vers l’expérience de l’objet mis en espace.
A partir de là, l’enjeu est de proposer tous types de services (payants) pour rendre l’expérience la plus complète possible : jeux vidéo, lecture sur place, achat de livres, restaurant, café. Le manga café parisien propose plus de 10 000 titres à la consultation et 5000 titres à la vente. A voir le site, les services en ligne sont quasiment inexistants.
Voilà qui interroge le modèle économique des librairies classiques, en diversifiant les sources de revenus, non pas seulement à partir d’un genre : les mangas mais d’un ensemble de pratiques culturelles ciblées.
Bien sûr il ne s’agit pas d’en tirer une recette miracle, mais à l’heure il y si peu de réflexions sur l’avenir de la librairie (autres que des appels défensifs) voilà qui est intéressant non ?
Et si une librairie devait avant tout se penser comme un espace et non comme un espace-de-vente-de-livres ? Et si sa valeur était AUTANT dans son aménagement et ses services que dans le fonds qu’elle propose et les conseils qu’elle prodigue ?
C’est bien la voie poursuivie par les bibliothèques qui s’engagent dans des projets inspirés des tiers-lieux, avec les limites suivantes : nos institutions publiques seront-elles capables de proposer un éventail de services suffisant ? A voir nos horaires d’ouvertures, les difficultés d’accès au Wifi et le filtrage du web, les idiotes restrictions sur la copie privée, il est permis d’en douter. Un tiers lieux qui n’est pas en phase avec les usages, notamment connectés, d’une génération peut-il en porter le nom ?