Ce que change le numérique en communs, réflexions à partir du film Demain 1/2
Je suis allé voir le film Demain. J’espère que vous avez déjà entendu parler de ce film qu’il ne faut pas rater ! Voici le pitch :
Et si montrer des solutions, raconter une histoire qui fait du bien, était la meilleure façon de résoudre les crises écologiques, économiques et sociales, que traversent nos pays ? Suite à la publication d’une étude qui annonce la possible disparition d’une partie de l’humanité d’ici 2100, Cyril Dion et Mélanie Laurent sont partis avec une équipe de quatre personnes enquêter dans dix pays pour comprendre ce qui pourrait provoquer cette catastrophe et surtout comment l’éviter. Durant leur voyage, ils ont rencontré les pionniers qui réinventent l’agriculture, l’énergie, l’économie, la démocratie et l’éducation. En mettant bout à bout ces initiatives positives et concrètes qui fonctionnent déjà, ils commencent à voir émerger ce que pourrait être le monde de demain…
Bien sûr ce film est réjouissant et habile dans la manière de présenter des liens entre initiatives innovantes et toutes participatives. Je l’ai beaucoup apprécié et je vous le recommande chaudement ! Il soulève aussi de nombreuses questions par ce qu’il ne dit pas. Un premier élément m’a frappé, c’est la place de la technique. L’agriculture biologique est présentée, comme très souvent dans les discours de l’écologie politique qui prônent la décroissance, sous l’angle de la relocalisation et de son insertion dans les milieux urbains. L’agroécologie comme une pratique à petite échelle non mécanisée et purifiée de tout objet technique. Si des choix ont nécessairement été faits pour construire ce documentaire, voilà qui me semble très caractéristique de ce qu’une partie de la pensée écologiste n’arrive pas à dépasser : le rejet d’un système technique perçu comme une menace en soi. Attention ce n’est qu’une des tendances d’un film qui présente par ailleurs des innovations technologiques liées à l’environnement. Le philosophe Stéphane Vial, dans l’être et l’écran explique très bien les origines philosophiques de ce phénomène de rejet de la technique. Je vous recommande ce livre passionnant :
[Selon Jacques] Ellul, c’est « la technique [qui] efface le principe même de la réalité », car « c’est elle qui fait apparaître ce non-réel qui est pris pour un réel (les biens de consommation, ou l’activité politique) par son propre processus de diffusion, par l’image – et c’est elle qui “se cache” derrière ce jeu lumineux d’apparences ». Bien entendu. La dénégation est si grossière qu’il est impossible d’en éviter l’interprétation. Dotée d’intentions, la technique est présentée comme une personne abstraite poursuivant ses propres fins, de manière autonome et indépendante des hommes. Quelle déception de voir ce grand penseur de la technique verser dans un tel écueil, à coups de protestations pour s’en défendre qui ne font que le trahir un peu plus… Gilbert Simondon avait pourtant très tôt mis en garde : Un homme cultivé ne se permettrait pas de parler des objets ou des personnages peints sur une toile comme de véritables réalités, ayant une intériorité, une volonté bonne ou mauvaise. Ce même homme parle pourtant des machines qui menacent l’homme comme s’il attribuait à ces objets une âme et une existence séparée, autonome, qui leur confère l’usage de sentiments et d’intentions envers l’homme. Il faut dire que la majorité des philosophes du XXe siècle – Simondon mis à part – ne sont guère parvenus à dépasser le niveau de l’angoisse dans l’analyse du phénomène technique. En 1953, Heidegger ne voit en elle qu’un phénomène d’« arraisonnement de la nature23 » qui sanctionne définitivement l’oubli de l’être. En 1964, Herbert Marcuse estime que, « devant les aspects totalitaires de cette société, il n’est plus possible de parler de “neutralité” de la technologie » car selon lui « la société technologique est un système de domination qui fonctionne au niveau même des conceptions et des constructions des techniques ». En 1968, Jürgen Habermas l’envisage comme une « idéologie » couplée à la science, à la production industrielle et à la technocratie étatique. Aussi, lorsqu’Ellul présente en 1977 le système technicien comme « un objet en soi », dont le développement s’imposerait aux hommes autant qu’il serait indépendant d’eux, il parachève trente ans de condamnation idéologique de la technique envisagée comme responsable tout à la fois de l’abrutissement de l’homme, de l’aliénation capitaliste et du désenchantement du monde.
Tout comme Stéphane Vial je considère pour ma part que la technique est un fait profondément humain et social qui ne saurait être considéré comme autonome :
Nous vivons au milieu et à l’aide d’objets techniques très élaborés, mais dont nous n’avons aucune connaissance particulière. « Technologie, dans cette optique, c’est le nom de la technique dont nous nous sentons dépossédés », écrit même Jean-Pierre Séris. Mais pourquoi voir dans cette transcendance une dépossession ? La technique n’est pas plus transcendante à l’homme que la science ou l’art. La science aussi se fait sans nous et hors de nous, sans que nous ne maîtrisions aucun savoir scientifique et sans être nous-mêmes des savants. Pour l’art, il en va de même : nous ne sommes pas tous des artistes. Pourtant, nous ne nous sentons dépossédés ni de la science ni de l’art. Pourquoi le serions-nous de la technique ? Conduire une automobile sans savoir techniquement comment elle fonctionne ou bien utiliser la puissance de calcul de la matière informatisée sans connaître le cœur de l’ordinateur, voilà qui constitue une délivrance par la technique plutôt qu’une dépossession de la technique. N’oublions jamais que l’objet technique, comme le rappelle si bien François Dagognet, est avant tout le « ce sans quoi nous sommes sans pouvoir » : On ne le sait que trop, nos doigts ne coupent pas, les ongles se cassent, mais le fil de la lame du couteau remplace avantageusement nos tissus trop mous. L’objet en général constitue donc notre nature opérationnelle, le ce sans quoi nous sommes sans pouvoir. Le verre capte, divise et conserve un liquide que nos mains ne peuvent pas retenir. De même l’habit nous enveloppe et nous protège, en même temps qu’il nous distingue.
Il rejoint en cela Bruno Latour (et le génial Peter Sloterijk) qui dans le livre Cogitamus explique qu’il n’y a pas de progrès, pas de nature, nous avons toujours été en prise non pas avec un univers mais DES MULTIVERS fait d’humains et d’objets hybrides en co-production. Bruno Latour peut ainsi affirmer : nous n’avons jamais été modernes parce que nous n’avons jamais accompli le programme de la modernité qui entendait séparer l’homme de la nature et pratiquer des sciences pour s’en rendre « maître et possesseurs ». Ce qui me semble essentiel dans cette approche est de comprendre que la technique est pharmakon, c’est-à-dire à la fois le poison et le remède, mais qu’elle n’est en rien neutre. La technique et les technologies numériques ne sont pas que des outils se sont des agents de transformation de nos visions du monde. Ainsi, pour Stéphane Vial,
les dispositifs techniques sont – ont toujours été – des « machines philosophiques », c’est-à-dire des conditions de possibilité du réel ou, mieux, des générateurs de réalité. C’est ce que nous appelons des « matrices ontophaniques », c’est-à-dire des structures a priori de la perception, historiquement datées et culturellement variables.
Dans le film Demain, le numérique est quasiment absent des discours, tout se passe comme si les échanges de connaissance sous-jacents à la montée en compétence des communautés locales n’existaient pas. Or ces échanges ne peuvent avoir lieu que parce que la reproduction de l’information numérique à coût marginal nul existe. Sans internet, sans Wikipédia, sans les réseaux d’échanges d’information, les initiatives locales n’auraient aucune chance de faire réseaux. Cette attention au local en vient à s’opposer à une échelle globale trop souvent assimilée aux dérives de la mondialistation. Si je partage l’idée exposée dans le film d’une transformation du monde par la diversité et non par de grands modèles dominants, il me semble assez fâcheux de que la diversité et le local ne soient pas associées au partage des connaissances et à leur circulation… Comment développer l’agriculture urbaine sans en diffuser largement les méthodes? Comment aller au delà d’une académie des maires en Inde qui ne soit qu’un club de gens qui se rencontrent réellement? La circulation de l’information numérique n’est abordée qu’à l’occasion de la présentation des modes de paiement pour les monnaies complémentaires locales… Cette absence d’une sensibilité à l’information et à ses conditions techniques et juridiques de circulation se retrouve même dans la forme du film, financé avec une vitesse fulgurante :
moins de 72 heures après le lancement de l’appel à contribution citoyen sur la plateforme KissKissBankBank plus de 4180 contributeurs se sont déjà manifestés et contribué à hauteur de 87% de la somme recherchée (200 000 euros).
Ce financement sur une plateforme participative s’est fait sans qu’aucune contrepartie de libération juridique ne soit proposée aux contributeurs. On peut comprendre la volonté initiale d’utiliser un circuit de diffusion traditionnel (impossible de s’inscrire dans l’économie du cinéma avec des creative commons aujourd’hui). Mais on peut regretter que les droits du film ne soient pas libérés une fois sa rentabilité atteinte, il aurait été permis d’en citer des extraits de manière non contrainte. Faute d’une telle démarche aucune réutilisation n’est permise et même si le film se diffuse bien il est impossible de le découper de le citer de le remixer en toute sécurité juridique… Impossible d’en faire un commun de la connaissance. Le choix de ne pas (ou peu) aborder les technologies numériques est le reflet d’un angle mort qui empêche à l’heure actuelle une convergence des discours entre le numérique en communs et toute une partie de la pensée et de l’action écologiste. Au fond, André Gorz est un des rares penseurs de l’écologie a avoir très tôt compris le potentiel des transformations technologiques qui abaissent le coût de reproduction de l’information et favorisent la valeur d’usage sur la valeur d’échange. Mais alors comment caractériser ce changement de perception, celle nouvelle matrice ontophanique du numérique en communs pour reprendre l’expression de Stéphane Vial? Cet ensemble de glissements est très bien expliqué par Michel Bauwens dans le wiki de la p2p fondation. Merci aux membres de SavoirsCom1 pour le précieux coup de main sur la traduction. Lisez attentivement ce qui suit, tout y est !
Valorisation des compétences : par opposition au modes de production traditionnels qui sur-valorisent les diplômes, la production en pair-à-pair valorise les capacités à effectuer une tache donnée. ( ≠ Diplomânie) Non-rivalité : le partage d’un bien n’en diminue pas la valeur, mais au contraire, l’accroît. ( ≠ rivalité) Valididation coopérative : le contrôle de la qualité n’est pas une condition préalable à la participation, mais un processus a posteriori, le plus souvent pris en charge par la communauté. ( ≠ contrôle hiérarchique) Répartition des tâches : il n’existe pas de rôle ou d’emplois à occuper, mais seulement des tâches spécifiques à accomplir ( ≠ division du travail) Equipotentailité : les personnes sont jugéés uniquement sur les aspects spécifiques de leur personnalité qui ont été impliqués dans l’accomplissment d’une tache particulière. ( ≠ évaluation des personnels) A but de bénéfice collectif (bénéfice partagé, production orientée vers l’intérêt collectif). La production a pour but de créer une valeur d’usage appelée aussi ‘bénéfice’, au profit de la communauté de ses usagers, et non au profit des actionnaires. ( ≠ finalité lucrative) Bifurcation : la liberté de copier et de modifier implique la possibilité de se saisir le projet pour lui conférer une orientation différente ( ≠ une seule version officielle) Granularité : fait référence aux efforts destinés à créer des modules les plus petits possible de manière à abaisser autant que possible le seuil departicipation pour la prise en charge d’une tâche. Holoptisme : pour tout projet, l’information est transparente par défaut ; tous les ajouts doivent être sourcés et peuvent être vus et validés. ( ≠ panoptisme). Modularité : les tâches, les produits et les services sont organisés en modules, qui s’assemblent à d’autres modules pour former un puzzle qui est ré-assemblé en permanence ; tout le monde peut contribuer à chacun des modules (voir aussiComposabilité, tiré de la terminologie de l’ingénierie logicielle. Coordination négociée : les conflits sont résolus à travers un dialogue arbitral continu et non par des décisions sans relief venues d’en-haut OU /arbitraires et imposées/ ( ? processus de décision hiérarchiques et centralisés). (voir aussi « subsidiarité », « la délégation d’un processus de décision au niveau opérationnel de ceux qui travaillent directement dans le domaine considéré ». Légitimité d’Action : il n’est pas nécessaire de demander une quelconque permission pour contribuer aux biens communs ( ≠ culture de l’autorisation) Consom’action : il n’y a pas de stricte séparation entre production et consommation, les utilisateurs peuvent également produire des solutions ( ≠production pour la consommation) Stimergie : il existe un langage de signalisation qui permet de diffuser les besoins du système et de les mettre en correspondance avec des contributions potentielles.
Si cette nouvelle matrice des communs numériques existe, quels sont les freins à la généralisation du discours des communs? C’est le point que je traiterai dans la suite ces réflexions à partir du film, Demain.
Merci pour cet article passionnant. C’est vrai que même la séquence sur l’agriculture bio naturelle très intensive, tendrait à prouver que l’on souhaite refonner sa pleine puissance à la nature et que le technique ne serait que porteur d’une fausse promesse. C’est moins vrai sur la gestion des énergies au Danemark, et à San Francisco même si c’est bien souvent un changement de mentalité assez rustique et très encadré par des systèmes d’incentives/pénalités qui apportent le changement. L’écologie soulève, on le voit bien la force du « communautaire », du vivre ensemble, à l’heure où par ailleurs, les grands déséquilibres géopolitiques entrainés par la mégestion de l’explosion démographique empêche de raisonner autrement que dans l’urgence. Demain sera t il à l’ordre de notre prochaine élection présidentielle ou de notre refondation européenne ? Je le souhaite, mais je pense que toutes les industries de programme (cf B. Syiegler) mobilisent davantage nos attentions sur le Jeu de la Fortune les dernières innovations cosmétiques qlomentaires, les sextapes des stars. J’aurai tant préféré qu’ine élite comme Macron vienne d’Akoba ou de Greenpeace plutôt que de la Banque Rotschild et que notre ministre de la Culture soit une ancienne de chez Mouchkine plutôt qu’une obscure Enarque de plus. Mais la réflexion avance cet article en est la preuve.
Merci pour cet article très intéressant.
Arriver à bien distinguer la « pharmakonité » de la technique et sa (prétendue) neutralité, voilà un bon exercice – merci d’avoir lancé cette piste.
Par contre, dire qu’un dispositif technique est une structure a priori de la perception, historiquement daté et culturellement variable, c’est tomber dans la contradiction : il suffit peut-être d’enlever « a priori », et de dire que certains « dispositifs techniques » sont… des instruments ?
Si tu ne connais pas, n’hésite pas à lire les travaux de PIerre Rabardel, qui peuvent laisser espérer que tous les chercheurs n’ont pas oublié Simondon.
Ce point de vue de phénoménologie des techniques ayant été largement diffusé depuis deux ans et demi, P ouvez-vous préciser où vous voyez une contradiction ? Le terme « a priori » est bien sûr pris ici au sens kantien (transcendantal) au sens d’un « transcendantal historique » comme dit Pierre Lévy.
Merci pour votre réponse.
« Deux ans et demie » c’est par rapport à la date de sortie de votre livre ? Si oui, j’imagine qu’il faudra que je le lise pour appliquer le principe cartésien de générosité, et comprendre en quoi l’expression n’est pas contradictoire. Mais le fait qu’un point de vue se diffuse m’invite autant à l’accepter qu’à le remettre en question 🙂
C’est justement parce que je prenais « a priori » au sens kantien que je voyais un problème : tout ce qui « structure » notre perception du monde ne relève pas de l’a priori, sinon Kant aurait dit que les lunettes sont des structures a priori de la perception, bien qu’externes au sujet connaissant… J’imagine qu’il aurait plutôt dit que ce sont des outils qui modifient notre sensibilité pour une finalité particulière (ne pas voir flou), mais qu’ils ne modifient pas les conditions de possibilité notre expérience en général – donc ne relèvent pas du transcendantal en tant que tel.
Même si nous avions tous des lunettes et qu’il était impossible de bien voir sans elles, ça n’en ferait pas des éléments d’une structure a priori de l’expérience, juste des instruments d’une meilleure sensibilité. Même chose pour moi si nous avions tous des casques de réalité virtuelle…
Du coup je ne comprends pas bien le besoin de solliciter le concept kantien d’a priori.
J’essaie de comprendre – merci d’avance de vos éclairages !
Il faut lire le chapitre 3 du livre. La théorie de l’ontophanie introduit une nouveauté, à savoir : il existe du transcendantal situé hors du sujet de la connaissance et placé dans la culture technique de l’époque. C’est le cœur de mon propos. Il y aussi de bonnes vidéos sur mon site, issues de conférences ou autre.
OK, merci pour la réponse. Je suis curieux (et sceptique) sur la possibilité d’étendre ce concept de « transcendantal » hors du sujet connaissant.
Par contre, dire que certains dispositifs techniques qui nous entourent conditionnent non seulement nos possibilités d’agir mais aussi nos possibilités de percevoir le monde qui nous entoure, pas de souci… c’est d’ailleurs déjà dans Bertrand Gille que vous citez.
« Si je partage l’idée exposée dans le film d’une transformation du monde par la diversité et non par de grands modèles dominants, il me semble assez fâcheux de que la diversité et le local ne soient pas associées au partage des connaissances et à leur circulation… » dites-vous (ce n’est qu’un extrait parmi d’autres possibles qui vont dans le même sens). Tout votre propos consiste à justifier l’indispensable du numérique pour créer des réseaux afin de faire largement partager les pratiques de communs, telles évoquées dans Demain (même si le film ne parle pas de communs, c’est tout comme, un mot reste un mot et c’est le sens qui compte). Ma question est simple : comment s’y prenait-on avant le numérique pour communiquer puisque vous dites clairement « hors du numérique libre pas de salut ! »en reprochant aux réalisateurs de Demain de ne pas en parler, alors que ce n’était pas du tout l’objet de leur documentaire. Diantre, j’ai un âge qui m’a fait vivre bien des choses d’avant le numérique, dont la guerre d’Algérie et des luttes significatives (dont mai 68) du 20° siècle… et je n’ai vraiment pas gardé le souvenir d’une non communication; on partageait des connaissances et elles circulaient certes beaucoup moins vite qu’avec internet, mais elles circulaient largement, et pas toujours librement! comme sur internet d’ailleurs…
Je travaille actuellement sur les consortages et les albergements alpins au Moyen-âge, ce sont des précurseurs quasi évidents de communs actuels (pâturages, forêts, canaux d’irrigation, etc.); faute d’internet les agriculteurs de l’époque se réunissaient souvent (les églises servaient aussi à cela) pour gouverner ces communs et régler des conflits qui pouvaient être violents, et ils écrivaient beaucoup grâce à des clercs écrivains (le numérique de l’époque peut-être?)
En ce moment, je fais des recherches documentaires sur ce sujet et internet me permet de gagner beaucoup de temps en m’évitant aussi des déplacements fastidieux et couteux pour aller consulter des archives.
Je n’ai donc rien contre le numérique, bien au contraire, mais je ne crois pas qu’il faille lui donner plus d’importance que ce qu’il est réellement : un outil facilitant la communication pour tous en réseau, très rapide et mondialisée, que demander de plus, sinon qu’il soit de plus en plus libre d’accès, non exclusif et non rival ?
Vous tombez précisément dans le piège que je dénonce dans le billet. Il ne s’agit pas de dire que c’était mieux ou moins bien avant, juste de comprendre que le numérique modifie la perception du monde qui nous entoure. Continuer à considérer que c’est juste un outil revient à nier ces changements tendanciels que j’ai tenté de qualifier… Ces changements sont tendanciels, et donc indépendants de vos pratiques et perceptions personnelles.
Généralement on oppose un système à un autre système, et non une tendance à un système…
Or je m’oppose à un système économique fondé essentiellement sur la finance spéculative mondialisé (cf. les dernières révélations sur Panama), ce jeu pervers conduisant à des catastrophes sociales, écologiques, humanitaires… Et pour l’instant je ne vois pas d’autre opposition possible que celle développée dans le cadre de l’économie sociale et solidaire (entendue dans son sens le plus large, celui définit par la loi de juillet 2014), système certes encore balbutiant, mais qui révèle d’autres possibles bien réels dans la façon de concevoir le monde et sa gouvernance. Le numérique participe évidemment à cette approche systémique, mais je n’arrive vraiment pas à en faire l’objet central tendanciel qui va modifier ma perception du monde ! Ce qui m’intéresse avant tout, ce sont les récits d’acteurs de la société civile sur leurs pratiques et je tente modestement de participer à leur conceptualisation pour les porter à la connaissance du plus grand nombre, et là effectivement le numérique peut être d’une grande aide.