Voici l’interview en intégralité, Vous pouvez contacter Magali Haettiger – Directrice du réseau des médiathèques de Lorient
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Cette expérience s’inscrit dans le projet de création d’un nouveau portail Web pour le réseau des médiathèques de Lorient ainsi que dans le projet d’établissement. Nous voulions travailler sur un service en ligne basé sur la fiction en nous positionnant entre deux extrêmes: D’une part le coup de cœur publié en ligne par les bibliothécaires qui s’apparente à un acte de prescription, une politique de l’offre qui s’adresse à tous et d’autre part le catalogue qui permet de trouver des références de romans à la condition que l’on ait une idée de ce que l’on cherche et les clés qui le permettent. Il nous a donc semblé intéressant de rendre possible l’envoi par mails de conseils de lecture personnalisés, correspondant à une envie définie par l’internaute.
Comment définir une envie? Comment permettre à l’internaute de guider le bibliothécaire sur ses goûts et ses attentes? Une solution aurait consisté à proposer un formulaire avec une question ouverte comme, d’ailleurs, le proposent d’autres services en ligne. Nous aurions pu également proposer aux internautes de s’identifier en fonction de leurs goûts à travers un questionnaire comme nous pouvons être amenés à le faire pour l’envoi ciblé des nouveautés de la médiathèque. Mais même si cette solution nous paraissait intéressante, elle nous a semblé figer l’internaute dans un profil, or nous voulions plutôt que celui-ci définisse une envie qui pouvait être variable dans le temps, passagère. Nous avons donc préféré que ce questionnaire passager prenne la forme d’un parcours à travers une interface graphique. Cela permettait en outre, d’éviter le caractère intimidant d’une question ouverte du type « qu’est-ce que vous avez envie de lire? » en guidant simplement l’internaute sur la base d’items simples: le genre, l’histoire qui correspondent à ce que l’on peut nous demander en salle dans la bibliothèque.
Le choix de ne demander que très peu d’informations personnelles à l’internaute (son âge et son email) est aussi un parti pris sans doute délicat. Je vous avoue que j’étais curieuse de voir comment nous allions répondre aux internautes en étant déconnectés de certaines informations sur celui-ci, informations qui parfois orientent nos conseils lorsque nous sommes en salle. Sans tomber dans la caricature, les bibliothécaires que nous sommes avons parfois davantage tendance à présenter des BD et des mangas aux jeunes à casquette et conseillons assez rarement des romans policiers sanglants ou des romans érotiques à des dames âgées! Que se passe-t il quand nous avons peu d’informations et donc peu de préjugés notamment de genre? La question reste bien évidemment ouverte!
Les bibliothécaires qui répondent travaillent au sein du réseau des médiathèques de Lorient (en tout trois médiathèques et un bibliobus). Nous sommes 30 à répondre à tour de rôle. Chaque « jour » est sous la responsabilité de deux personnes. Notre réponse est signée de nos initiales car même avec les mêmes items sélectionnés par l’internaute, nous n’aurons pas les mêmes idées, ni les mêmes références. Il ne s’agit pas d’être exhaustif mais de donner un conseil qui peut être relativement subjectif. La réponse du bibliothécaire est donc signée de ses initiales, comme d’ailleurs sont signés par les bibliothécaires contributeurs les coups de cœurs mis en ligne sur le portail.
Non. L’indexation systématique de la fiction à travers un vocabulaire contrôlé ne nous a pas semblé être une solution pertinente. Ou, du moins, elle paraissait lourde à mettre en place au regard des résultats (la recherche par index étant somme toute assez peu intuitive pour les utilisateurs des catalogues en lecture publique). Par contre, avec des catalogues aujourd’hui basés sur des moteurs de recherche, il est plus intéressant de proposer des notices enrichies avec des contenues même si parfois le trop plein d’informations peut être aussi perturbant.
En général (sauf quand le service est saturé) nous ajoutons un résumé et nous justifions nos choix même rapidement. Ceci dit, malgré l’absence de publicité et le caractère expérimental du service, il nous est arrivé d’être au bord de la saturation, ce qui peut expliquer qu’à certains moments certaines réponses soient plus courtes qu’à d’autres.Le service a été lancé en juin, sans publicité avec l’idée d’évaluer l’idée et adapter le projet. Par contre, le lien vers la notice bibliographique du catalogue la médiathèque pose question. Elle aura sans doute du sens lorsque nous serons passés à une autre phase du projet.
La réponse peut ressembler à une comptine: en 24h c’est impossible, en 48h vous savez que nous serons en retard pour certaines questions posées le samedi et 72h est le délai le plus court qui permet de répondre dans les temps aux internautes qui ont posé leur demande le samedi.
La création de l’interface graphique a fait partie du cahier des charges du portail Web et donc de la prestation d’ensemble. Par contre, la création de l’interface professionnelle a été prise en charge par le service informatique de la ville.
Quelles sont les perspectives de développement de ce service?
De mon point de vue, les deux questions sont liées. Rien qu’en période de test, sans publicité le service rencontre un certain succès qu’il nous est parfois difficile de contenir (comme souvent dans ce genre de cas). Le réseau des médiathèques de Lorient est de taille moyenne et n’a pas forcément vocation à répondre à l’ensemble des internautes ou du moins les moyens, comme peuvent le faire de gros établissements. La question du développement du service est donc à envisager au regard de nos moyens et de nos missions. A ce titre, jenesaispasquoilire pourrait devenir à Lorient un service que nous proposons aux usagers du réseau lorientais uniquement. Même si ce n’est pas forcément ce que nous souhaitons, il faut rester modeste et pragmatique.
Par contre, à une échelle plus grande, et peut-être souhaitable, la coopération et la mise en réseau d’un service de ce type serait sans doute une belle opportunité pour donner au service une ampleur plus grande et toucher un public plus vaste. Certains services de questions réponses ont montré leur efficacité sur des organisation en réseau. Nous n’avons pas été contactés à ce sujet mais nous sommes ouverts.